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Comment balayer les principes de la laïcité en un discours, retour sur une visite Présidentielle au Saint Siège.

Communiqué de la FSU

Le déplacement de N. Sarkozy le 20 décembre pour prendre possession du titre de chanoine honoraire de la basilique de Latran l’a conduit à un discours qui ne peut que susciter l’indignation des défenseurs de la laïcité.

Les propos tenus par le Président de la République à cette occasion sont innacceptables mais n’ont pas étonné ceux qui ont suivi de près sa campagne électorale et certaines interventions télévisées dans lesquelles le lien ESPERANCE-CROYANCE était maintes fois affirmé.

«  Dans la transmission des valeurs et dans l’apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur, même s’il est important qu’il s’en approche parce qu’il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d’un engagement porté par l’espérance.  ».
Cette phrase est choquante à plus d’un titre. L’homme et la société ne pourraient se passer du religieux pour définir ce qui est bien et ce qui est mal. Sur tous les débats de société, juridiques, politiques, éthiques qui se posent dans le monde aujourd’hui on imagine facilement où peut conduire ce genre de soumission.
L’exemple du droit à l’avortement et la tentation d’imposer le créationnisme ne sont que deux exemples parmi d’autres. Quant à « la radicalité du sacrifice » il serait l’apanage des seuls religieux. Toutes celles et tous ceux qui à travers l’histoire de notre pays se sont engagés, ont combattu parfois jusqu’au sacrifice conscient de leur vie, pour l’idéal de la liberté, voient leur combat minimisé voire méprisé au regard du sens et de la portée qu’ils ont donné à leur acte.

« La morale laïque risque toujours de s’épuiser et de se changer en fanatisme quand elle n’est pas adossée à une espérance qui comble l’aspiration à l’infini ». « (...) Mais un homme qui croit, c’est un homme qui espère et l’intérêt de la République, c’est qu’il y ait beaucoup d’hommes qui espèrent ».

 L’histoire et l’actualité présente sont tragiquement pleines de tous les fanatismes qui se sont construits et continuent de se construire à partir de la volonté d’imposer un certain type « d’aspiration à l’infini ». Le choix et la richesse de la laïcité sont justement de ne pas s’immiscer dans « cette aspiration à l’infini », laissant chaque citoyen sur ce sujet, libre de sa propre réponse. La critique de N. Sarkozy porte donc ici sur la nature même de la laïcité. Tous ceux qui, croyants ou non croyants, ont inscrit leur combat dans une perspective de progrès ont souvent fondé ce combat sur une espérance qui ne relevait pas de celle à laquelle N.Sarkozy fait manifestement référence.

 Du contrôle social au contrôle des consciences, l’appel à l’intervention des religieux dans les banlieues, les institutions, les universités marque une rupture profonde avec les principes fondamentaux de la laïcité républicaine. Ces discours sont significatifs d’une conception des rapports sociaux où les religions sont appelées à la rescousse de politiques libérales qui accroissent les inégalités, mettent à mal les solidarités et fragmentent le corps social.

 On pourrait continuer ainsi les citations plus scandaleuses les unes que les autres (le besoin pour la France de catholiques « pleinement chrétiens », la comparaison entre son engagement en politique et l’engagement religieux, la reconnaissance d’une France « fille aînée de l’Eglise ») qui signifie une soumission à l’église catholique.

 En assimilant et en ramenant l’identité nationale aux racines chrétiennes, Nicolas Sarkozy reprend une des thématiques chère à l’extrême droite. Il opère une falsification historique qui conduit aujourd’hui à présenter l’étranger comme un danger et à encourager la chasse au sans papier. C’est la même logique qui a présidé à la mise en place du Ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale.

Dans ce discours transparaît un mode de relation entre la République et la Papauté qui s’identifie presque à celle qui existait entre le pape et le roi sous l’ancien régime.

Les interventions du président de la République lors de son voyage en Arabie Saoudite ne font que confirmer la gravité des attaques contre le caractère laïque de la République.

 Le principe de laïcité est inscrit dans l’article premier de la Constitution. La République est laïque refusant le mélange entre convictions religieuses et exercice des responsabilités politiques. Elle garantit la liberté de conscience et de culte mais n’en reconnaît ni n’en soutient aucun. Elle garantit aussi, à l’encontre du prosélytisme religieux, la liberté absolue d’être sans religion. Dans notre pays, la laïcité est un élément majeur du lien politique.

Ce ce qui rend proprement intolérable les propos de Nicolas Sarkozy, c’est qu’ils soient tenus officiellement par un Président de la République en exercice, donc au nom de la France. Nicolas Sarkozy a beau dire qu’il ne modifiera pas « les grands équilibres de la loi de 1905 », le contenu même de son discours constitue une remise en cause des éléments essentiels de cette loi qui impose à l’Etat et à ses représentants (en particulier au premier d’entre eux) une stricte neutralité. En ce sens ce discours est anticonstitutionnel car contraire au Préambule de la Constitution.

Article publié le 19 janvier 2008.


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