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La vérité sur les chiffres du chômage :

Selon les chiffres du chômage publiés hier et le commentaire du ministre du Travail, la situation de l’emploi continuerait de s’améliorer. Le gouvernement poursuit là une politique de « l’indice » peu crédible sur le fond.
Si le nombre des chômeurs de Catégorie 1 a une nouvelle fois reculé, cela ne signifie nullement une amélioration parallèle de l’emploi.

D’un côté, « les chômages invisibles » représentent un nombre équivalent de salariés à la recherche d’un emploi mais écartés des statistiques officielles, comme l’a montré l’Association « Autres chiffres du chômage ».

De l’autre, les salariés exclus d’un véritable emploi, condamnés à la précarité au temps partiel imposé, aux stages, aux petits boulots subis se sont considérablement accrus.

C’est au total selon les chiffres de la Cgt, 21 % de la population active et 4,9 millions de personnes qui sont temporairement ou durablement exclues d’un véritable emploi. Cet indicateur construit à partir d’un croisement des statistiques de l’emploi et des données du fichier de l’ANPE reste stable ces cinq dernières années démontrant que la baisse apparente du chômage se traduit par une montée de la précarité et une exclusion réelle du « marché du travail ».

Collectif " Les Autres Chiffres du Chômage " ( ACDC ) :

 La brêche ouverte en début d’année par Fabienne Brutus n’a pas été vaine. Initié par les associations Réseau d’Alerte sur les Inégalités, AC !, MNCP, le Réseau Stop Précarité et les syndicats SNU-ANPE, SUD-ANPE et CGT-INSEE, le collectif « Les autres chiffres du chômage » (ACDC) accuse les statistiques d’escamoter quelque 2,3 millions de "chômeurs invisibles" et vient de publier la première d’une série de notes qu’il diffusera chaque fin de mois et jusqu’en mai, une opération visant à "marquer la campagne électorale" et donner à la question sociale "la place qui lui revient dans le débat électoral" à venir.

 Officiellement, le chômage touchait 2.172.000 de personnes en octobre. Mais ce chiffre ne tient compte que des chômeurs de catégorie 1, c’est-à-dire des demandeurs d’emploi immédiatement disponibles, à la recherche d’un CDI à temps plein, et qui ont travaillé moins de 78 heures dans le mois. Actuellement, le calcul du taux de chômage exclut donc les personnes en recherche d’emploi qui, faute de mieux, se contentent de missions d’intérim, d’un temps partiel ou d’un CDD, ceux qui exercent une "activité réduite" de plus de 78 heures par mois mais cherchent une activité plus stable et restent dans les fichiers, les chômeurs des départements d’outre mer (DOM), les chômeurs en arrêt-maladie ou en formation, les licenciés économiques en convention de reclassement personnalisée (CRP) ou en contrat de transition professionnelle (CTP), ou bien encore les chômeurs "âgés" dispensés de recherche d’emploi (DRE). Ce sont au total "près de 4,45 millions de personnes" qui sont recensées "en tant que demandeurs d’emplois" dans les 8 catégories de l’ANPE, n’en déplaise à Jean-Louis Borloo...

 Cet écart avec les statistiques officielles est une "manipulation des chiffres" qu’a dénoncée l’économiste Pierre Concialdi, représentant d’ACDC, membre du CERC et co-fondateur du RAI-Bip40, lors d’une conférence de presse. "Depuis 25 ans ces « chômeurs invisibles » représentent une proportion croissante de l’ensemble des inscrits à l’ANPE : au cours de l’année 2006, la part de ces chômeurs dans le total des demandeurs d’emploi a dépassé pour la première fois 50% alors qu’elle n’en représentait que 10% en 1982", selon le collectif qui ajoute que, malgré ces "artifices statistiques", le chômage "se maintient à un niveau structurellement élevé" depuis le début des années 1990 et que le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à l’ANPE "demeure inflexible autour de 4,5 millions" depuis 15 ans.

 Dans sa note, ACDC fournit une batterie de chiffres issus de l’ANPE elle-même et revient sur vingt-cinq années de classification des chômeurs et de pratiques de l’Agence. Observant que la part des chômages invisibles a été "multipliée par quatre" sur le dernier quart de siècle, Philippe Sabater, du SNU-ANPE, constate que "l’instrumentalisation politique de l’ANPE est plus forte que jamais".

 Parmi les demandeurs d’emploi échappant au chiffre officiel, ACDC évoque quelque 220.000 "chômeurs des départements d’Outre-Mer qui n’apparaissent jamais dans le bilan mensuel commenté par le gouvernement". Le collectif dénonce aussi le cas de 871.000 personnes, demandeuses "d’emploi temporaire ou à temps partiel", expliquant que 250.000 "chômeurs de la catégorie 1 ont été basculés vers les catégories 2 et 3 (demandeurs d’emploi à temps partiel ou temporaire)" de 1997 à 2000... Un transfert qui résulterait d’une "modification" des méthodes de l’ANPE et non "d’une passion subite de ceux-ci pour les CDD ou le temps partiel", même si l’ANPE souligne que les catégories de chômeurs "existent depuis 1995" et que leurs définitions n’ont depuis "pas changé"...

 Parmi les « chômeurs invisibles », le collectif compte également 412.000 "dispensés de recherche d’emploi", catégorie apparue en 1985 qui englobe "des demandeurs d’emploi âgés" de plus de 55 ans, et 452.000 "chômeurs en activité réduite" - demandeurs d’emploi ayant travaillé plus de 78 heures dans le mois, "écartés du chiffre officiel depuis 1995". Le collectif recense aussi 321.000 "demandeurs d’emploi non immédiatement disponibles" car en stage, en contrat aidé, en formation, en CRP ou en arrêt-maladie. "Il y a aussi les découragés qui touchent le RMI mais ne cherchent même plus à s’inscrire à l’ANPE et sur lesquels aucune statistique n’existe", ajoute Philippe Sabater : effectivement, 63% des 1,3 million de RMIstes ne pointent pas à l’ANPE.

 De plus, 47% des chômeurs ne sont pas indemnisés du tout : plus « invisibles » on ne fait pas ! Et la polémique sur l’explosion des radiations n’est pas abordée. Si le collectif affirme à juste titre que "plus de la moitié des demandeurs d’emploi sont exclus du chiffre officiel".

Bref, "baser le décompte uniquement sur la catégorie 1, ce qui fait dire au gouvernement qu’il est en train de gagner la bataille pour l’emploi, nous semble très contestable", résume Thomas Coutrot, autre économiste et co-fondateur du Réseau d’Alerte sur les Inégalités. "La question qu’on pose à tous, c’est : est-ce qu’on peut continuer comme ça alors que le chiffre officiel apparaît de moins en moins crédible ?", s’interroge Philippe Sabater, poursuivant : "Est-ce qu’il y a une alternative pour régler ce chômage qu’on ne veut pas voir ? Tous ces gens, qu’est-ce qu’on met en place pour leur trouver des solutions ?" .

Article publié le 30 décembre 2006.


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