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AIRBUS : petit retour sur 10 ans de dérive libérale ou comment Lagardère a réalisé une petite plus value de 2 milliards d’euros en 2006.

Dix ans de dérive libérale et financière
Quelques dates et événements clés pour rappeler comment en moins de dix ans, le privé prend la main sur l’industrie aéronautique et détourne son capital au détriment d’une maîtrise publique.

Et dire que certains « s’offusquent » aujourd’hui de voir le débat sur l’avenir d’Airbus prendre une tournure politique.
 C’est véritablement par un acte politique et une déclaration commune le 9 décembre 1997 que le virage vers le privé s’amorce. Le 9 décembre 1997, Jacques Chirac, Lionel Jospin, Helmut Kohl et Tony Blair se prononcent pour une réorganisation urgente au niveau européen des industries aérospatiales, électroniques et de défense. Par ce même texte, ils demandent aux partenaires de préparer le changement de statut d’Airbus. Fini le groupement d’intérêt économique (GIE) constituant Airbus depuis sa création en 1970 et fondé sur les coopérations entre quatre pays. Il s’agit de préparer l’intégration de l’avionneur européen dans une société de droit privé.

 1998. En juillet, l’entreprise publique Aérospatiale et Matra hautes technologies fusionnent. Avec 48 % des parts, l’ ??tat passe en dessous de la barre des 50 % et la porte s’ouvre grand à la privatisation. « C’est le prix à payer » pour préparer les bases d’une future société européenne, explique Dominique Strauss-Kahn, alors ministre des Finances. Un an plus tard, Aérospatiale-Matra assure dans un communiqué que « l’objectif de rentabilité opérationnelle fixé à 8 % sera dépassé à l’horizon des cinq prochaines années ».

 1999. En octobre, Aérospatiale-Matra fusionne avec l’allemand Daimler-Chrysler pour former le groupe européen aéronautique et de défense EADS qui sera officialisé le 10 juillet 2000. Le capital de EADS se répartit ainsi jusqu’à la mi-2006 : 30,28 % pour la Sogeade qui regroupe à égalité (15,14 %) l’ ??tat français et Lagardère ; même proportion (30,28 %) pour Daimler-Chrysler ; 5,54 % pour l’ ??tat espagnol ; et 33,9 % constitués de capitaux flottants provenant des marchés financiers. On apprend que le pacte d’actionnaires au sein de Sogeade prévoit que les intérêts de la France sont « portés » par l’actionnaire privé. EADS est alors actionnaire à 80 % d’Airbus, British Aerospace (BAE) détient les 20 % restants. Des voix s’élèvent pour interroger : « Quel sera l’objectif prioritaire : la création de valeur pour l’actionnaire ou de nouvelles conquêtes européennes pour l’industrie aéronautique et l’emploi ? ». 1999, c’est aussi l’année où Airbus vend déjà plus d’avions que les dix premières années de son existence.

 2001. Airbus devient une société intégrée de droit privé.

 2002. Alors que cette année-là Airbus livre 300 appareils. Le président d’Airbus Noël Forgeard annonce le 17 juin que 6 000 réductions d’emplois sont prévues dans le groupe par des départs volontaires, par la suppression d’emplois à temps partiel, de travail temporaire, de contrats de sous-traitants.

 2003. Pour la première fois, Airbus passe devant Boeing pour la vente d’avions dans le monde. Les actionnaires de EADS demandent que la marge opérationnelle qui s’élève à 7 % en 2003 « atteigne les 10 % le plus vite possible ». Noël Forgeard met alors en place un nouveau plan de réduction des coûts, Route 06, qui prévoit 1,5 milliard d’euros d’économies par an.

 2006. Les groupes privés retirent en partie leurs billes. En septembre, c’est BAE qui vend ses 20 % dans Airbus pour 2,7 milliards d’euros et en tire un bénéfice de 1,77 milliard d’euros. Quelques mois plus tôt, les actionnaires privés fondateurs de EADS annonçaient leur prise de distance. Lagardère et Daimler-Chrysler cèdent chacun 7,5 % de leurs parts, pour se recentrer sur leurs métiers d’origine, les médias pour le premier, l’automobile pour le second. Du côté allemand, les 7,5 % sont achetés par des investisseurs privés (60 %) et publics (40 %) dont des Länder. La cession de la part Lagardère est progressive jusqu’en 2009. Les syndicats d’Airbus dénoncent les importantes plus-values - 2 milliards d’euros chacun- que vont réaliser ces deux actionnaires en vendant leurs 7,5 %. Des banques russes ont acheté en septembre 6 % d’actions EADS sur les marchés financiers. Ces derniers temps, des investisseurs du Qatar lorgnent sur une part du capital du groupe européen.

 Dans la future répartition du capital de EADS, (??tat français 15 %, Lagardère 7,5 %, Daimler-Chrysler 22,5 %, ??tat espagnol 5,5 %), quasiment la moitié (49,5 %) de EADS serait constituée par du capital flottant issu des marchés financiers. Le plus volatil, le plus exigeant de rentabilité financière à très court terme alors que l’industrie aéronautique a besoin de temps, d’investissements importants, durables et stables, et surtout d’un retour à une véritable maîtrise publique.

Article paru dans le quotidien L’Humanité du 6 mars 2007


Article publié le 7 mars 2007.


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