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Accidentés du travail. Le mépris des travailleurs .

Accidentés du travail. Le mépris des travailleurs

Par Arnaud de Broca, secrétaire général de la FNATH, association des accidentés de la vie.

 Les accidentés du travail sont-ils des profiteurs ?
Qu’il est facile d’encenser les gens qui se lèvent tôt et de prôner la valeur travail, et de les mépriser dès qu’ils sont accidentés ou malades… et tout cela sous couvert d’une pseudo-équité ou justice sociale ! Il a même été fait allusion à un courage politique : pour nous, le courage ne consiste sûrement pas à imposer les victimes du travail.

 Les victimes du travail ne sont pas opposées à être traitées « comme les autres », mais il faut alors que cette volonté d’égalité de traitement ne soit pas utilisée, manipulée et orientée dans le cadre d’une politique de communication bien ficelée. L’égalité de traitement, en démocratie, c’est un projet politique, pas un argument tactique. Les partisans de cette fiscalisation se trompent de combat et d’arguments. Non, nous ne sommes pas dans le cadre du débat sur les « niches fiscales » au même titre que les stock-options ou encore les retraites chapeau. Non, les travailleurs devenus accidentés, malades ou handicapés - et y compris lorsque l’arrêt est de courte durée - ne sont pas des parasites ou des profiteurs du système bien à l’abri derrière une confortable pension. Non, il ne s’agit pas de revenus de remplacement payés par la Sécurité sociale au même titre que les indemnités journalières de maladie ou de maternité.

 Il s’agit bien d’un dommage corporel, dont le coût est pris en charge par les employeurs - du moins en partie seulement -, parce que ce sinistre est la réalisation d’un risque professionnel du fait de conditions de travail déplorables. Il s’agit bien de réparer un sinistre car il y a eu, dans la majorité des cas, une faute et que ce sinistre cause des préjudices comme, la perte du salaire.

 Tous les rapports commandés par les gouvernements successifs depuis vingt ans, y compris les rapports parlementaires signés de la main même des députés et sénateurs UMP, ont considéré que la réponse sociale donnée aux victimes du travail est, aujourd’hui, totalement dépassée, si on l’a comparée aux autres régimes de réparation d’un dommage corporel. Le constat est pourtant assez simple : la victime du travail, par rapport à la victime d’un accident de la route, d’une agression, ou d’un accident médical, reste, et de très loin, la moins bien indemnisée dans la France de 2009. De fait, l’indemnisation perçue est forfaitaire, autrement dit limitée à certains des préjudices subis seulement ; loin, très loin de l’indemnisation intégrale de tous les préjudices qui prévaut en droit commun. Rien d’étonnant à cela puisque ce régime de réparation a été mis en place en 1898 et n’a jamais bougé dans ses fondamentaux ! Il n’y a donc pas d’avantages indus mais bien une sorte de compensation fiscale à une inégalité de traitement. Pour autant, les victimes du travail sont toutes disposées à abandonner cette exonération si elles devaient recevoir une indemnisation intégrale à la charge des employeurs fautifs ! Alors, engageons le vrai débat de la réparation des victimes du travail sur un véritable plan d’équité et pas uniquement sur le terrain de la maîtrise des dépenses publiques.

 Jean-François Copé et le gouvernement ont également oublié d’évoquer, dans ce débat qui se veut pourtant aussi un débat de finances publiques et sociales, celui du coût de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles. Que fait le ministre du rapport de la commission Diricq, qui analyse tous les trois ans l’évolution de la sous-déclaration des accidents du travail ? Alors que cette commission a estimé ce montant annuel à 1,015 milliard d’euros, la dernière loi de financement de la Sécurité sociale a demandé à la branche AT-MP, financée par les employeurs, de reverser à l’assurance maladie une somme bien inférieure, égale à 710 millions d’euros. Mais il est sans doute plus confortable d’imposer les victimes et leurs familles à hauteur de 150 millions que d’exiger, enfin, que les employeurs paient réellement le solde de leurs dettes de 300 millions à l’assurance maladie.

Certains parlementaires se sont déclarés « mal à l’aise » face à cette proposition. Nous avons devant nous plusieurs semaines pour les convaincre de la justesse de nos arguments.

Article publié le 27 septembre 2009.


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