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Les propos sidérants d’un candidat à la magistrature suprême.

Après avoir débuté sa campagne présidentielle en citant Blum, Jaurès et Moquet le représentant de la droite néo-conservatrice et VRP du MEDEF s’est lâché lors d’un entretien avec le philosophe Michel Onfray paru dans le mensuel "Philosophie Magazine" d’avril 2007.

En voici quelques morceaux de choix :

Michel Onfray : "[...] on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile. Je pense que nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement, par les conditions familiales et socio-historiques dans lesquelles nous évoluons."

Nicolas Sarkozy : "Je ne suis pas d’accord avec vous. J’inclinerais, pour ma part, à penser qu’on naît pédophile, et c’est d’ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1200 ou 1300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n’est pas parce que leur parents s’en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable."

Plusieurs membres de la communauté scientifique ont réagi à ces propos :

 Le généticien André Langaney directeur du laboratoire d’anthropologie biologique du Musée de l’Homme, s’est exprimé sur France Info et a vu dans les déclarations de Nicolas Sarkozy une réminiscence de "ce que voulaient faire des gens pendant la deuxième guerre mondiale". "Il y a des scientifiques d’extrême droite qui pensent qu’on a tout à la naissance et qu’on ne peut plus rien changer. Si on suit ces gens-là, il faudrait presque faire des tests génétiques à la naissance ou faire un tri des embryons pour éliminer les pédophiles avant qu’ils naissent".

 Interrogé par l’AFP le Pr Bernard Golse, pédopsychiatre à l’hôpital Necker-Enfants malades a indiqué : "c’est une ineptie purement idéologique qui est totalement à côté des acquis actuels de la science et de la génétique en particulier", ajoutant : "Entamer une croisade sur l’aspect génétique de la pédophilie est scientifiquement non fondé".

"L’idée d’une pédophilie prédictible et génétique, c’est purement renouer avec le chromosome du crime de Cesare Lambroso", criminologue italien du XIXe siècle, relève le Pr Golse.

 Défendre l’idée d’un tel type de déterminisme est "extrêmement dangereux", met en garde Christine Bellas-Cabane, présidente du Syndicat national des médecins de la protection maternelle et infantile (SNMPMI), rappelant, elle aussi, les risques de dérives eugénistes.

Assurant qu’"il n’y a pas de gène d’un destin malheureux", le généticien Axel Kahn a jugé dimanche "relativement grave" l’existence de "tout un courant qui prétend que les gènes sont tellement déterminants (...) qu’ils sont responsables de certains désordres de la société, et que par conséquent, la contrainte, les difficultés économiques, les malheurs sociaux n’y sont pour rien". Il a dénoncé , dans un entretien au quotidien L’Humanité : "La vision d’un gène commandant un comportement complexe tel que ceux conduisant à l’agressivité, à la violence, à la délinquance, à la dépression profonde avec dérive suicidaire, est ridicule et fausse"... "cette conviction réaffirmée par le candidat de l’UMP à l’Elysée confirme ses liens idéologiques avec la nouvelle droite".

 Il faut ici également se souvenir de ce projet de plan de prévention de la délinquance élaboré par le même Nicolas Sarkozy qui prônait, notamment, une détection très précoce des « troubles comportementaux » chez l’enfant, censés annoncer un parcours vers la délinquance

Pour le Pr Golse les récents propos de Nicolas Sarkozy renvoient aussi à une "façon très linéaire, réductrice et faussement prédictible d’utiliser la génétique". Or, dit-il, compte tenu des acquis de la science, on "n’est plus du tout dans une génétique causale reliant un gène et un effet comportemental", mais dans "une génétique beaucoup plus complexe, une génétique de vulnérabilité".

Avoir des "facteurs de susceptibilité, de prédisposition, cela ne suffit pas pour devenir délinquant ou se suicider, il y a des effets de rencontres avec l’environnement au sens large : relationnel, psychologique, sociologique, politique, culturel", souligne-t-il. Il n’y a, dit-il, "aucune prédiction possible parce que, par définition, les effets de rencontres sont imprévisibles, sinon notre vie serait entièrement écrite à l’avance".

En ce qui concerne la pédophilie, il n’y a "pas la moindre preuve" de gènes de susceptibilité, insiste-t-il.

 Une expression comportementale est "souvent reliée à plusieurs types de facteurs qui s’entrecroisent, qui s’articulent", souligne aussi le Pr Gérard Schmidt, président du Collège de pédopsychiatrie.
"La maturation cérébrale continue jusqu’à l’adolescence" en interaction avec les expériences vécues, ajoute-t-il, mettant en garde contre toute prédiction sur la base de comportements précoces ou de caractéristiques purement génétiques (AFP)

A noter également la réaction de Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris, qui a critiqué samedi l’idée d’une éventuelle prédétermination génétique des pédophiles,
insistant sur la liberté de l’homme et pointant le risque d’eugénisme.

Article publié le 10 avril 2007.


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