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REVENUS Les ménages pauvres plombés par les dépenses contraintes XAVIER MOLÉNAT

Le niveau de vie est le principal indicateur utilisé pour la mesure de la pauvreté monétaire, des inégalités et de leurs évolutions. Calculé en divisant le revenu disponible1 d’un ménage par le nombre d’unités de consommation2, il représente une tentative d’approcher au mieux les sommes dont disposent effectivement les individus pour consommer et épargner, compte tenu de leur situation familiale (célibataire, en couple, avec ou sans enfants…).

Le poids des dépenses pré-engagées

Mais cette façon de calculer le budget des ménages ne tient pas compte du fait qu’un certain nombre de dépenses sont « préengagées », autrement dit dépendent, comme l’expliquent Michèle Lelièvre et Nathan Rémila, « d’un contrat difficilement renégociable à court terme ».

Le logement constitue une large part de ces dépenses, qui incluent également les abonnements téléphoniques et télévisuels, les assurances, la cantine scolaire… Pour s’approcher davantage encore du « ressenti qu’ont les personnes de leurs marges de manoeuvre financières », les deux chercheurs ont donc entrepris de calculer la part respective des dépenses préengagées et du revenu « arbitrables » (dont l’usage n’est pas contraint) dans le budget des ménages.

En s’appuyant sur l’enquête Budget de famille 2011, Michèle Lelièvre et Nathan Rémila montrent que les dépenses préengagées représentent en moyenne 30 % du revenu disponible, avec de fortes variations selon le niveau de vie. Cette part s’élève en effet à 23 % au sein des 25 % des ménages les plus aisés, mais elle atteint 61 % pour ceux vivant sous le seuil de pauvreté (977 euros en 2011). Quelle que soit la catégorie sociale, les familles monoparentales sont souvent celles dont le budget est le plus contraint.

Des inégalités creusées

Écarter les dépenses préengagées aggrave les inégalités : si le niveau de vie des 10 % des ménages les plus aisés (2 800 euros et plus) est 3,3 fois supérieur à celui des 10 % les plus pauvres (moins de 840 euros), ce rapport passe à 5,7 si l’on prend en compte le seul niveau de vie arbitrable (2 180 euros, contre 380).

Les auteurs de l’étude proposent même d’aller plus loin en intégrant aux dépenses préengagées celles dédiées à l’alimentation qui, sans dépendre d’un contrat, « sont pour partie non ajustables, car de première nécessité ». A cette aune, les inégalités explosent : après dépenses alimentaires, le niveau de vie arbitrable des 10 % les plus riches (plus de 1 890 euros) est plus de dix fois supérieur à celui des 10 % les pauvres, à qui il reste… moins de 180 euros à dépenser. De quoi mieux comprendre pourquoi les fins de mois sont particulièrement difficiles au bas de l’échelle sociale.

1. Revenus déclarés par les ménages auxquels on ajoute les prestations sociales ainsi que les revenus non imposables du patrimoine, et dont on déduit les impôts directs.
2. L’Insee attribue 1 unité de consommation (UC) au premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans et plus, et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans.

Article publié le 18 novembre 2018.


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